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Lionel Scotto

L’avocat qui murmurait à l’oreille des décideurs

Lionel SCOTTO se présente comme un « avocat, entrepreneur et chef d'entreprise ». C’est l’ouverture à l’international avec les programmes d’échanges qui lui donnent envie de rejoindre la Faculté Jean Monnet. Un choix déterminant pour sa carrière puisqu’il terminera son cursus à l’Université de Kent en Angleterre. Avocat à Londres, spécialisé en Droit financier, il rentre en France quelques années plus tard pour fonder son propre cabinet à 31 ans. Soctto Partners est aujourd’hui leader en France sur le marché du private equity.

Pourriez-vous vous présenter ? Quel est votre parcours de formation ? Quel est votre parcours professionnel ?

La première chose que je tiens à dire c’est que je dois beaucoup à la Faculté Jean Monnet qui a eu ce côté pionnier et visionnaire, bien avant Erasmus, de s’ouvrir à l’Europe et même à l’international. J’avais participé avant de m’inscrire à Jean Monnet à une Journée Portes Ouvertes organisée par la Fac et il y avait un stand consacré au métier d’avocat dans une dimension internationale, cela avait vraiment motivé mon inscription dans une optique d’échanges. La Faculté avait en effet noué des partenariats étroits avec d’autres universités à l’étranger avec la conviction qu’il était enrichissant pour les étudiants de se former avec deux systèmes culturels, à l’époque : l’Angleterre, l’Espagne, l’Allemagne et les Etats-Unis. L’accent était mis sur l’apprentissage des langues et il y avait des cours de renforcement. La Faculté travaillait directement avec l’Institut supérieur d’interprétation et traduction (l’ISIT aujourd’hui devenu l’Institut de management et de communication interculturels). Cela a été très déterminant dans ma carrière, dès ma deuxième année j’ai opté pour ce système d’échanges et j’ai choisi l’Université de Kent en Angleterre car ce pays offre une des meilleures formations universitaires au monde. J’avais envie d’un parcours dans deux pays, d’une double culture notamment juridique. J’ai donc un double cursus avocat de Droit français et avocat de Droit anglais car les formations que j’ai suivi en France comme en Angleterre sont diplômantes. Sans le savoir j’ai été visionnaire, cette double formation m’a offert beaucoup de crédibilité et d’assurance.

Beaucoup de français expatriés disent que l’Angleterre est un pays attachant. Et vous ?

Oui c’est un pays très attachant. Après avoir obtenu mon diplôme d’avocat en Angleterre, je suis resté de l’autre côté de la Manche mais j’ai quitté Kent pour Londres. J’ai travaillé à la City, à l’époque l’Angleterre avait une avance très significative par rapport à la France en matière de Droit des affaires mais surtout de Droit financier et de « Private Equity ». Cette expérience a été une immersion très efficace dans le monde du travail. L’idée est que l’avocat puisse conseiller mais surtout accompagner les entreprises mais aussi les fonds d’investissement afin de partager la valeur entre les différents partenaires notamment l’opérationnel et les actionnaires. Il s’agit surtout de créer un système de répartition satisfaisant pour chacun.

Vous avez monté votre cabinet à 31 ans seulement, racontez-nous !

Comme je le disais, j’ai débuté ma carrière à Londres en travaillant plusieurs années auprès du cabinet Théodore Goddard. Le cabinet a créé une antenne parisienne pour finalement fusionner avec un cabinet américain. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de créer ma propre structure à 31 ans. Au départ avec un associé qui faisait du Droit social et une secrétaire. Très vite il y a eu un vrai élan, un vrai engouement avec pas mal d’embauche. Nous sommes désormais stabilisés avec 40 collaborateurs parmi lesquels 6 associés dont deux femmes et deux hommes. De mon point de vue, c’est la taille idéale pour un cabinet, si nous étions plus de collaborateurs ce serait trop de gestion RH alors qu’aujourd’hui nous sommes très flexibles ce qui est un atout important. Nous avons vraiment vocation à offrir du sur-mesure à nos clients, on se concentre sur la qualité et non la quantité et puis j’aime travailler sur des dossiers à forte valeur ajoutée.

C’est un vrai succès alors ?

Pendant longtemps, la France a connu une économie « traditionnelle » pendant assez longtemps, aujourd’hui 20 % de celle-ci est tenue par des fonds d’investissement mais c’était le cas depuis plusieurs années en Angleterre. Grâce à mon expérience londonienne, j’ai pu comprendre et intégrer ces mécaniques juridiques et financières et en revenant en France j’ai pu fonder mon propre cabinet. Ce bagage de compétences m’a offert un avantage concurrentiel non négligeable. Mon cabinet a connu un début très dynamique et il a très vite décollé avec des transactions en milliers puis en millions d’euros. Aujourd’hui, nous sommes leader en France sur ce marché du Droit financier spécialisé en « Private Equity ». A l’international nous avons le même niveau que de grands cabinets anglo-saxons et désormais nous les concurrençons. Le cabinet a donc une véritable dimension internationale ce qui est très challengeant car il y a une sectorisation du Droit au sens où chaque pays dispose de son propre Droit, sa propre législation. Nous avons un correspondant dans chaque pays où l’on travaille déjà et nous sommes capables à chaque fois de proposer au client une équipe sur-mesure. A nouveau, je dois beaucoup à la Faculté Jean Monnet car le Droit anglais et la langue anglaise ont beaucoup influencé le Droit dans le monde, historiquement avec le Commonwealth mais aujourd’hui encore. En étudiant le Droit anglais autant que le Droit français à mes débuts je suis parti avec un socle de connaissances très solide pour l’international. J’aurais été seulement avocat de Droit français, je n’aurais jamais eu ce parcours.

Vous vous définissez comme «avocat, entrepreneur et chef d’entreprise», pourriez-vous nous en dire plus sur ce triple statut ?

Fonder ce cabinet a été une vraie aventure entrepreneuriale avec un début de start-up dans un domaine quasi inconnu en France à l’époque jusqu’à devenir leader en France et concurrencer des cabinets historiques au niveau mondial. Pour cette casquette entrepreneur, j’ai du tout apprendre en autodidacte : la trésorerie, les besoins en fonds de roulement, les locaux, le recrutement, la formation des jeunes, l’informatique, bref il a fallu apprendre à gérer une entreprise du Droit. Je me suis formé sur le tas. J’en suis fier parce que je suis un pur produit de la République né dans une famille modeste et j’ai grandi professionnellement grâce à la force du système scolaire et universitaire français. Je dois beaucoup aussi à l’Europe, grâce aux différents accords entre la France et les autres pays, je n’ai rien déboursé pour ma scolarité à Kent alors que c’était très cher et que je n’aurais pas pu me l’offrir. Nous étions logés sur place aussi. Sans ce système d’aide et d’accompagnement je n’en serais pas là aujourd’hui. Désormais je ne changerai de métier et de place pour rien au monde, j’aime vraiment la force de décision et je ne pourrais plus être subordonné à quelqu’un d’autre. J’essaie d’offrir cette qualité de vie à mes collaborateurs, chacun dispose de grandes latitudes dans sa manière de travailler et d’une grande liberté. Notre style de travail est peu formel je dois dire !

Vous dites que vous murmurez à l’oreille des décideurs : vous conseillez autant que vous défendez ?

Notre cabinet ne fait pas de contentieux, c’est un choix. Notre ADN réside dans le conseil et non la défense. On conseille et on oriente nos clients pour qu’ils ne soient justement jamais confronté à du contentieux. Nous sommes là pour prévenir, accompagner, conseiller. Bref, nous sommes un cabinet d’avocats de conseils. Comme nous ne sommes pas dans le contentieux nous ne sommes jamais face au juge. Nous devons surtout convaincre le client que notre conseil est le bon. Finalement nous plaidons auprès de notre client, comme dans une plaidoirie, il faut organiser son argumentation, construire son propos, embarquer le client dans la vision que nous avons, apprécier les rapports de force. Il n’y a pas de tierce personne comme le juge, du coup il n’y a pas l’aléa de la compréhension du juge. C’est un face-à-face avec le client. On convainc ou on ne convainc pas. J’aime ce lien direct de la négociation.

Vous avez été classé parmi les 50 meilleurs avocats selon le Magazine Décideurs et dans ce classement vous appartenez à la catégorie des «Fonceurs», pourriez-vous revenir sur ce classement ?

Oui je suis un fonceur, mais attention je prends le mot fonceur dans le sens de « moteur ». Nous avons pour parti-pris de conseiller les créateurs de la valeur économique, ce qui est une énorme responsabilité. Le cabinet est atypique dans la manière de travailler et notre positionnement requiert beaucoup d’exigences. Nos collaborateurs doivent maitriser à la fois le droit, la finance et les langues qui sont trois expertises au cœur du cabinet. Je dis « maitriser » mais en réalité il faut être virtuose dans ces trois domaines ce qui n’est pas évident. Concernant notre clientèle nous cherchons des dossiers à forte valeur ajoutée autrement dit qui sortent de l’ordinaire et à chaque fois nous proposons du sur-mesure. Enfin, en matière de management comme je le disais les collaborateurs disposent d’une grande autonomie. C’est notre côté disruptif.

Vous êtes amoureux de belles voitures et sportif, pourriez-nous vous parler de ces deux passions ?

J’ai toujours aimé les belles voitures. Depuis l’enfance un beau bruit de moteur me fait toujours de l’effet. J’ai travaillé aussi en me disant que ce rêve deviendrait un jour accessible. En France nous avons du mal à parler argent mais j’estime qu’un métier doit permettre de s’épanouir et d’accéder à une indépendance financière. C’est ce que j’appelle la réussite. Pour ma part un marqueur de ma réussite a été de pouvoir enfin m’offrir le bolide et même les bolides dont je rêvais, mais surtout de participer à des courses comme le Tour Auto que j’ai fait. La dernière fois c’était avec une Porsche des années 1970, un moment unique, un vrai plaisir ! Une de mes plus belles acquisitions est une Mercedes 300 SL avec des ailes papillon au niveau du toit, une voiture-icône dont l’esthétique est unique, un rêve d’enfance !
Dans le sport, je retrouve mon côté fonceur avec la notion du dépassement de soi. J’aime beaucoup le ski de randonnée où l’on fait l’ascension en peaux de phoques, c’est très physique mais cela me détend car je ne pense à rien d’autre. Une de mes dernières courses de montagne partait de Chamonix jusqu’à Zermatt en Suisse avec plusieurs nuits en refuge et un passage à la frontière.

 

Interview de Sabine Ferrier, 
Chargée du réseau des diplômés de l’Université Paris-Saclay, 
Direction de la Formation et de la réussite de l’Université Paris-Saclay.

2018