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Le serment – Perspectives juridiques contemporaines

2022-06-01 09:00 2022-06-01 18:00 Le serment – Perspectives juridiques contemporaines

Le serment a été particulièrement bien analysé par les historiens et les historiens du droit, voire par des sociologues et des anthropologues. En témoignent les actes de colloque dirigés respectivement par Raymond Verdier et Françoise Laurent (Le serment, Paris, Éditions du CNRS, 2 vol., 1991 et Serment, promesse et engagement : rituels et modalités au Moyen-Âge, Cahiers du CRISIMA, Presses universitaires de la Méditerranée, 2008). Il est en revanche assez rare que les juristes s’intéressent au serment en droit positif. Il est souvent borné au serment judiciaire ou au serment attendu des professions judiciaires, que l’on dit pour cette raison « assermentées ». Le serment apparaît en effet anachronique, vieillot, archaïque ; il serait le témoignage de sociétés autrefois religieuses, mais aujourd’hui sécularisées. Bref, le serment sentirait la naphtaline. Un paradoxe se fait cependant jour : comment expliquer cette défaveur intellectuelle ou morale pour le serment, et le succès fulgurant qu’il connaît dans les années récentes ? On ne veut pas seulement parler du serment des chefs d’État ou des membres des cours constitutionnelles, ou encore du serment d’Hippocrate, qui ont une histoire bien balisée et une facture classique, car on s’intéresse ici à des serments de création récente : le serment de l’élu local (2015), le serment des forces de l’ordre (2021), le serment de thèse (2020), etc. Comment expliquer ce goût pour le serment alors qu’il est très largement déconsidéré ? Que signifie-t-il encore aujourd’hui pour que le constituant, le législateur ou le pouvoir réglementaire le généralisent ?
Notre hypothèse est que le serment n’est pas anodin, aujourd’hui encore, et qu’il est l’indice de sociétés à la recherche de repères ou de pierres de touche. Dans des civilisations rongées par l’individualisme, caractéristique de la période contemporaine, le serment est le moyen de « faire corps » et de donner l’assurance à une communauté politique qu’elle sera correctement dirigée et protégée par les puissants de ce monde (les élus, les fonctionnaires publics, les serviteurs de la Justice, les médecins). Sans doute le serment traduit-il aussi une méfiance envers les élites ou les corps intermédiaires, de sorte qu’il servirait de boussole comme de rempart à l’heure où la déontologie et la transparence sont à la mode. Ici, le serment donne des gages à la collectivité contre ceux qui exercent des fonctions vitales – et c’est pour cela qu’elles sont le plus souvent publiques ou au service du public.
Le colloque réunira des juristes d’horizons divers : des praticiens (magistrats, avocats) comme des universitaires, qu’ils soient historiens du droit, spécialistes de droit privé, de droit pénal ou de droit public, et même
archéologues. L’objectif de leurs travaux est de réfléchir à la place accordée de nos jours au serment en France comme à l’étranger. La perspective comparée sera en effet privilégiée dans plusieurs contributions.

54, Boulevard Desgranges, 92330 Sceaux
Thematique : Recherche

Colloque sous la direction de Julien Boudon, Mercredi 1er juin 2022 en salle Georges Vedel et également accessible sur Collaborate : https://eu.bbcollab.com/guest/5583a01fa610426f9c8435e85005ca69

  • Public
    Réservé à certains publics
  • Type d'évènement
    Conférence / séminaire / webinaire
  • Dates
    Mercredi 1 juin, 09h00
    09:00 am - 06:00 pm
  • Lieu
    54, Boulevard Desgranges, 92330 Sceaux

Le serment a été particulièrement bien analysé par les historiens et les historiens du droit, voire par des sociologues et des anthropologues. En témoignent les actes de colloque dirigés respectivement par Raymond Verdier et Françoise Laurent (Le serment, Paris, Éditions du CNRS, 2 vol., 1991 et Serment, promesse et engagement : rituels et modalités au Moyen-Âge, Cahiers du CRISIMA, Presses universitaires de la Méditerranée, 2008). Il est en revanche assez rare que les juristes s’intéressent au serment en droit positif. Il est souvent borné au serment judiciaire ou au serment attendu des professions judiciaires, que l’on dit pour cette raison « assermentées ». Le serment apparaît en effet anachronique, vieillot, archaïque ; il serait le témoignage de sociétés autrefois religieuses, mais aujourd’hui sécularisées. Bref, le serment sentirait la naphtaline. Un paradoxe se fait cependant jour : comment expliquer cette défaveur intellectuelle ou morale pour le serment, et le succès fulgurant qu’il connaît dans les années récentes ? On ne veut pas seulement parler du serment des chefs d’État ou des membres des cours constitutionnelles, ou encore du serment d’Hippocrate, qui ont une histoire bien balisée et une facture classique, car on s’intéresse ici à des serments de création récente : le serment de l’élu local (2015), le serment des forces de l’ordre (2021), le serment de thèse (2020), etc. Comment expliquer ce goût pour le serment alors qu’il est très largement déconsidéré ? Que signifie-t-il encore aujourd’hui pour que le constituant, le législateur ou le pouvoir réglementaire le généralisent ?
Notre hypothèse est que le serment n’est pas anodin, aujourd’hui encore, et qu’il est l’indice de sociétés à la recherche de repères ou de pierres de touche. Dans des civilisations rongées par l’individualisme, caractéristique de la période contemporaine, le serment est le moyen de « faire corps » et de donner l’assurance à une communauté politique qu’elle sera correctement dirigée et protégée par les puissants de ce monde (les élus, les fonctionnaires publics, les serviteurs de la Justice, les médecins). Sans doute le serment traduit-il aussi une méfiance envers les élites ou les corps intermédiaires, de sorte qu’il servirait de boussole comme de rempart à l’heure où la déontologie et la transparence sont à la mode. Ici, le serment donne des gages à la collectivité contre ceux qui exercent des fonctions vitales – et c’est pour cela qu’elles sont le plus souvent publiques ou au service du public.
Le colloque réunira des juristes d’horizons divers : des praticiens (magistrats, avocats) comme des universitaires, qu’ils soient historiens du droit, spécialistes de droit privé, de droit pénal ou de droit public, et même
archéologues. L’objectif de leurs travaux est de réfléchir à la place accordée de nos jours au serment en France comme à l’étranger. La perspective comparée sera en effet privilégiée dans plusieurs contributions.